Le 3 mai 2022 l’ADAS publia sur son site Internet une Lettre ouverte adressée au Président du CPAS de Charleroi, lettre écrite par Cosme AGBODJI (plus connu sous son nom de plume Cosmos EGLO), auteur du livre intitulé Article 60.
Puis le 24 mai 2022 l’ADAS publia sur son site Facebook un témoignage du même auteur, intitulé Article 60 : la boîte de Pandore !
Et pour une boîte de Pandore, c’en fut vraiment une ! En effet, cet article déclencha spontanément un grand déballage. Ainsi, en un rien de temps des dizaines de personnes, hommes et femmes (tous passés à l’épreuve du contrat Article 60), épanchèrent leurs cœurs, laissant surgir à la surface des tourments qui, jusque-là, les travaillaient intérieurement.
Aujourd’hui, par conséquent, Cosme s’assigne pour mission de faire aussi bien la synthèse que l’analyse de ces témoignages accablants et de formuler des recommandations personnelles adéquates aux autorités compétentes.
Témoignages recueillis
Il convient de souligner que sur quarante-huit commentaires, trois firent état de « la chance » d’avoir été bien traités sur le lieu de travail. Ainsi, non seulement chacune de ces personnes avait eu droit aux clés des locaux, mais surtout droit au respect et à la convivialité. Qui plus est, jamais il ne fut question de les appeler « Article 60 ».
Par ailleurs, une autre personne écrivit avoir connu des « souffrances atroces » jusqu’à ce qu’elle fût transférée chez un autre « utilisateur » où elle se sentit mieux.
À présent notons que tous les autres témoignages émanèrent de personnes, soit ayant elles-mêmes mal vécu le travail sous contrat Article 60, ou ayant eu connaissance de chagrins d’un proche. En vrac je citerai : étiquette ou appellation « Article 60 » sur le lieu de travail, refus par « l’utilisateur » de fournir des clés, refus d’accès aux formations en interne, déconsidération, marginalisation, mépris de la part de collègues, jeux de pouvoir, harcèlement moral et psychologique, salaire misérable, pour ne citer que ceux-là.
Enfin, je ne saurai passer sous silence des félicitations exprimées par quelques internautes à mon égard pour mon livre Article 60. Une dame écrivit : « C’est tout de même extraordinaire que cet auteur ait eu le courage de publier son récit de vie sous contrat Article 60. Puisse son ouvrage ouvrir les yeux et toucher les cœurs de nos gouvernants. »
Analyse
Les trois témoignages qui firent état d’expériences heureuses n’avaient pas hésité à l’attribuer à « la chance », ce qui sous-entendait que ces personnes étaient conscientes des problématiques liées au contrat Article 60. D’ailleurs, l’une d’elles avait ainsi conclu : « d’autres n’ont pas eu cette chance ».
En ce qui me concerne, force est de reconnaître que le travail sous contrat Article 60 se passe plutôt bien pour certaines personnes. Seulement, comme l’écrivit un de nos internautes, « ces cas rares ne sont que des exceptions qui viennent confirmer la règle ».
En réalité, ce ne sont là que quelques gouttes de sourire dans un océan d’amertume !
Oui, avec un peu de recul, nous nous rendons compte que le travailleur employé sous contrat Article 60 devient vite victime de plusieurs situations malheureuses.
D’abord il s’agit des relations avec ses collègues ou son responsable de service sur le lieu de travail. En effet, ses collègues l’appellent « Article 60 » en lieu et place de son titre professionnel ou même de son nom. Ils croient devoir jouir d’une ascendance morale sur lui/elle, car, comme l’écrivit un de nos internautes, « Les travailleurs sous ce type de contrat sont souvent vus comme des personnes qui, ayant raté le train de l’emploi, n’ont d’autres alternatives que de faire de l’auto-stop, avec l’assistance du CPAS ».
Ensuite il est question d’interprétations inappropriées dans la désignation du statut réel du travailleur. Ce dernier ne serait pas un « travailleur à proprement parler » (c’est-à-dire, dans les faits, ne serait qu’un assisté social), motif souvent évoqué pour refuser de lui fournir des clés ou lui dénier le droit aux formations en interne. Un témoignage fait même état d’un cas où un travailleur sous contrat Article 60 à Fedasil aurait été refusé d’accès aux masques de protection, pour motif qu’il n’était pas un « vrai travailleur » de Fedasil.
En ce qui me concerne, je m’inscris en faux contre cette interprétation aberrante du statut professionnel du travailleur sous contrat Article 60. J’affirme à cor et à cri que ce contrat est un véritable contrat de travail, soumis à la Loi du 3 juillet 1978. Et c’est là où résident nos plus grandes préoccupations : à travail égal salaire inégal !
Oui, au fait, la grande majorité des travailleurs ne sont pas conscients de leur situation de personnes exploitées, surexploitées même, en ce qu’elles constituent une immense et muette réserve de main-d’œuvre bon marché pour les « utilisateurs ». Ces êtres humains, réduits en chevaux de trait, sont sous-payés par rapport à leurs collègues de même diplôme, et vivent au jour le jour, leur travail réduit en ce que les Anglais appellent « hand-to-mouth ».
Recommandations
À la lumière de tout ce qui précède, je voudrais formuler les recommandations suivantes aux autorités compétentes :
- Que le CPAS fasse un travail de terrain pour conscientiser leurs utilisateurs sur les problèmes de cohabitation auxquels sont confrontés les travailleurs Article 60 vis-à-vis de leurs collègues : appellation Article 60, jeux de pouvoir, mépris, etc.
- Que le CPAS clarifie sans équivoque le statut professionnel des travailleurs Article 60 : travailleurs ou assistés sociaux ?
- Que le CPAS règle une fois pour de bon cette question de droit (ou non) du travailleur aux clés des locaux.
- Si le contrat Article 60 est un contrat de travail au sens de la Loi du 3 juillet 1978, alors il faut que s’applique le concept : « à travail égal salaire égal ».
Conclusion
À ma connaissance, le Parlement Wallon envisage une réforme du travail sous contrat Article 60. Cette initiative, en soi, est fort louable. Nul ne peut nier cela. Seulement, j’ai bien peur que la montagne n’accouche que d’une souris, c’est-à-dire que la future réforme vienne tout améliorer, oui, tout, sauf l’essentiel…
C’est pourquoi, dans les derniers mots de ma lettre ouverte au Président du CPAS de Charleroi, j’avais écrit ceci :
Mesdames et Messieurs les députés, la meilleure bienveillance au monde peut causer autant de dégâts que la malveillance, si elle n’est pas éclairée, travaillée, sans cesse remise en question. Là-dessus, avec tout le respect que nous vous devons, nous vous interpellons ; nous faisons appel à tout ce qui réside en vous de plus noble, nous vous prions de vous inspirer de ces lignes pour canaliser toutes les bonnes volontés vers un profond changement, ne serait-ce que pour donner plus de dignité aux travailleurs sous contrat Article 60 et, ce faisant, confirmer sans équivoque l’immensité de vos dimensions humaines et professionnelles.
Cosme AGBODJI – Nom d’auteur : Cosmos EGLO
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