En matière de revenu d’intégration, suis-je obligé·de fournir les preuves de toutes mes charges, de toutes mes dépenses?
De nombreux CPAS exigent que vous fournissiez les preuves de toutes vos charges (loyer ; factures d’eau, gaz, électricité ; assurances ; frais de voiture ; frais de santé ; frais scolaires ; loisirs… bref, une grille budgétaire complète).
Ce n’est pourtant pas une obligation légale. Les conditions d’octroi du RI sont au nombre de 6. Aucune de ces conditions ne contient l’obligation de fournir les preuves de ses dépenses. Conditionner l’octroi du RI à fournir celles-ci est donc illégal.
De plus, cette exigence constitue une atteinte à la vie privée, tout comme celle de fournir les extraits de compte bancaires. Elle s’accompagne, dans certains CPAS, d’une examen minutieux entraînant des jugements de valeur inacceptables (exemple, vous dépensez pour soigner un chat ou un chien, ou pour payer une cotisation syndicale, ou encore vous faites vos courses ailleurs que dans les magasins réputés les moins chers), ou tirant des conclusions hâtives sur votre résidence ou votre état de besoin (exemple, vous faites toujours vos courses dans une autre commune que celle où vous dites habiter, donc « vous n’habitez pas là »). Les exemples ne manquent pas !
Pour le calcul du montant du RI, une grille budgétaire ne peut être demandée que dans l’examen de la prise en compte ou non des revenus des parents ou enfants cohabitants. Dans ces cas-là – aussi longtemps qu’existe la possibilité légale que le CPAS prenne en compte les revenus de votre parent ou enfant avec lequel vous cohabitez – cette grille peut être utile pour appuyer la demande que leurs revenus ne soient pas pris en compte du tout ou, que partiellement. Bizarrement, dans ces cas-là, le CPAS prend souvent en compte entièrement les revenus du parent ou de l’enfant cohabitant, sans examiner ni même demander les dépenses de l’ensemble du ménage, alors que ce serait dans votre intérêt.
Toutefois, si un examen de la situation financière de la famille se justifie dans ces cas-là, il ne doit pas se transformer en intrusion disproportionnée dans votre vie privée. Et l’examen du budget de la famille doit prendre en considération l’impact que cela peut avoir sur les relations familiales.
Nous y reviendrons dans une Fiche info spécifique tant cette question de la prise en compte des revenus du parent ou de l’enfant cohabitant est problématique et lourd de conséquences.
Certaines nuances peuvent être apportées au fait que fournir les preuves de vos dépenses n’est pas une condition d’octroi du RI. Par exemple, fournir la preuve du paiement du loyer peut être utile pour participer à la preuve de la résidence (une des 6 conditions d’octroi). Ce n’est toutefois pas une exigence légale, surtout que d’autres moyens existent (l’adresse renseignée comme domicile, une copie du bail, la visite à domicile…). Par contre, fournir les preuves des charges d’énergie (eau, gaz, électricité) n’est nullement indispensable ni obligatoire pour prouver la résidence. De nombreux CPAS ont pourtant cette exigence.
Une grille budgétaire peut par contre être exigée dans d’autres matières que le RI : une demande d’aide sociale complémentaire au RI, une gestion budgétaire, une médiation de dettes… Fournir une liste des dépenses dans ces cas-là ne devrait toutefois pas entraîner non plus des jugements de valeur sur chacun de vos choix ou de vos habitudes.
L’examen d’une demande de RI s’apparente souvent à un véritable parcours du combattant. Devoir fournir le budget complet alourdit inutilement et illégalement la procédure. Tout comme l’obligation de fournir les extraits et compte et toute une série d’informations dont le CPAS dispose déjà par les flux informatiques de la BCSS (Banque carrefour de la sécurité sociale) et du Registre national.
De nombreux rapports d’inspection indiquent que les CPAS ne peuvent pas exiger une grille budgétaire dans le cadre de l’examen du droit au RI. Nous en avons sélectionné quelques-uns (il y en a beaucoup d’autres !) parmi les rapports 2020 et 2021, adressés aux CPAS mentionnés ci-dessous par le service d’inspection du ministère de l’intégration sociale, leur ministère de tutelle.
En tant qu’association de défense des usagers des CPAS, nous nous demandons par ailleurs à quoi servent ces inspections si le non-respect des recommandations qu’elles formulent ne fait l’objet de la moindre sanction de la part du ministère qui subventionne les CPAS. Lorsqu’il est constaté que l’usager d’un CPAS fraude, il bénéficie rarement d’une simple recommandation avant d’être sanctionné. Ici, un acte administratif illégal fait l’objet d’une simple observation, voire de plusieurs lors de contrôles successifs… sans la moindre conséquence défavorable. Une sorte d’indulgence à l’égard de « délinquants récidivistes » ?
Toutefois, ces rapports existent. N’hésitez pas à les utiliser pour argumenter vis-à-vis de votre CPAS s’il exige que vous lui fournissiez des preuves qu’il n’est pas en droit de vous demander.
Assesse 2021
Budget du demandeur du DIS :
L’inspection a pu constater que votre personnel social exige de la part du demandeur de fournir des informations relatives à ses différentes charges financières. S’il va de soi que l’examen des ressources du bénéficiaire fait partie de l’enquête sociale, en revanche, un demandeur ou un bénéficiaire du droit à l’intégration sociale n’a pas l’obligation légale de présenter et justifier ses dépenses mensuelles au CPAS.
En d’autres mots, la constitution d’un budget n’est pas dans tous les cas pertinente et ne peut, en aucun cas, conditionner l’octroi du DIS (cf. grille de contrôle, refus sur base du non état de besoin). C’est l’article 3 de la Loi du 26/05/2002 qui énumère les 6 conditions d’octroi du droit à l’intégration sociale et il n’appartient pas aux CPAS d’en ajouter d’autres.
Ce budget peut par contre être pertinent dans certaines situations précises comme par exemple dans le cas de demandeurs / bénéficiaires qui cohabitent avec des ascendants dont il est possible de tenir compte des ressources.
Bruxelles 2021
(…)
D’autres documents exigés par votre service social pour justifier les dépenses de l’intéressé (ex : paiement des charges, frais de téléphonie et télévision, frais d’assurance, …) peuvent également constituer une ingérence dans la vie privée de ce dernier. La constitution ou bonne gestion du budget n’est pas une condition à part entière du DIS.
Ces pièces devraient être demandées et utilisées uniquement lorsque la situation spécifique le nécessite, ou dans le cadre des dossiers de gestion budgétaire, mais pas de façon systématique pour tous les bénéficiaires et demandeurs du DIS.
Cette remarque a déjà été formulée lors des contrôles de 2018, 2017 et 2016. Dès lors, nous vous demandons de veiller à ce que celle-ci entraine la mise en place de nouvelles et bonnes pratiques qui devront être constatées lors des prochains contrôles de cette matière.
Jemeppe-sur-Sambre 2022
Calcul des ressources en cas de cohabitation avec un ou plusieurs ascendants et/ou descendants majeurs au premier degré :
L’article 34,§2 de l’AR du 11/07/2002 portant règlement général en matière de droit à l’intégration sociale précise qu’ « en cas de cohabitation du demandeur avec un ou plusieurs ascendants et/ou descendants majeurs du premier degré, la partie des ressources de chacune de ces personnes qui dépasse le montant prévu à l’article 14, § 1er, 1° de la loi peut être prise totalement ou partiellement en considération; en cas d’application de cette disposition, le montant prévu à l’article 14, § 1er, 1° de la loi doit être octroyé fictivement au demandeur et à ses ascendants et/ou descendants majeurs du premier degré. ». La prise en compte des ressources des cohabitants ascendants et/ou descendants majeurs au premier degré est donc une faculté et non pas une obligation.
Dans les dossiers contrôlés dans lesquels le bénéficiaire cohabite avec un ou plusieurs ascendants et/ou descendants majeurs au premier degré, et dont il a été tenu compte des ressources de l’ascendant dans le calcul de son RI, la situation financière du ménage n’était pas toujours présentée dans l’enquête sociale, ce qui ne permettait pas de vérifier que la décision de prise en compte des ressources était réalisée sur base d’une proposition étayée du travailleur social.
Cette remarque a déjà été formulée lors des contrôles de 2020, 2018 et 2016
Plombières 2021
Grille budgétaire
L’inspectrice a constaté que votre Centre élaborait un budget mensuel via l’enquête sociale. Si la production par le bénéficiaire de certaines factures peut, dans des cas spécifiques, s’avérer utile afin par exemple de vérifier une présence effective dans un logement, une cohabitation ou de justifier la demande de ne pas prendre en compte les ressources des ascendants ou descendants cohabitants, l’inspection vous rappelle que l’article 3 de la loi du 26/05/2002 lie le droit à l’intégration à 6 conditions précises.
Or, aucune de ces conditions n’étant liée aux dépenses ou au budget du demandeur, ces informations ne doivent pas être systématiquement demandées et analysées par votre Centre dans le cadre de l’examen d’un droit à l’intégration.
Stoumont 2021
Ressources – élaboration d’un budget
L’inspectrice a constaté que votre Centre élaborait un budget via l’enquête sociale.
Si la production par le bénéficiaire de certaines factures peut, dans des cas spécifiques, s’avérer utile afin par exemple de vérifier une présence effective dans un logement, une cohabitation ou de justifier la demande de ne pas prendre en compte les ressources des ascendants ou descendants cohabitants, l’inspection vous rappelle que l’article 3 de la loi du 26/05/2002 lie le droit à l’intégration à 6 conditions précises.
Or, aucune de ces conditions n’étant liée aux dépenses ou au budget du demandeur, ces informations ne doivent pas être systématiquement demandées et analysées par votre Centre dans le cadre de l’examen d’un droit à l’intégration.
Thimister 2021
État des lieux des ressources # analyse budgétaire systématique :
Dans le cadre de l’enquête sociale préalable au DIS, c’est un état des lieux des ressources que nous souhaitons retrouver et non une analyse budgétaire, qui elle sera réservée à une demande d’aide sociale.
En 2021, l’inspectrice formule le même constat. Si la production par le bénéficiaire de certaines factures peut, dans des cas spécifiques, s’avérer utile afin par exemple de vérifier une présence effective dans un logement, une cohabitation ou de justifier la demande de ne pas prendre en compte les ressources des ascendants ou descendants cohabitants, l’inspection vous rappelle que l’article 3 de la loi du 26/05/2002 lie le droit à l’intégration à 6 conditions précises.
Or, aucune de ces conditions n’étant liée aux dépenses ou au budget du demandeur, ces informations ne doivent pas être systématiquement demandées et analysées par votre Centre dans le cadre de l’examen d’un droit à l’intégration.
Lorsque vous réalisez une analyse budgétaire, il vous est demandé de préciser dans le rapport social qu’elle permettra à votre Centre de tenir compte, partiellement ou entièrement, des ressources des ascendants ou descendants.
Boîte à outils
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