Pourquoi y-a-t-il tellement de différences d’un CPAS à l’autre, d’une antenne de quartier à l’autre, d’un·e assistant·e social·e à l’autre?  La loi n’est-elle pas la même pour toutes et tous?

Nous avons expliqué, dans une autre fiche info (« Quelles sont les différentes aides que je peux demander au CPAS ? »), la différence entre le revenu d’intégration « RI » ; l’aide financière équivalente « ASE » ; les diverses aides sociales réglementées par des arrêtés royaux ; et les aides sociales complémentaires.
La façon dont ces différentes aides sont accordées varie très fort d’un CPAS à l’autre, voire d’une antenne de quartier à l’autre, et même d’un assistant social à l’autre.

Pourquoi ? Qu’est-ce qui rend cela possible ?

1. Le RI, revenu d’intégration

Le RI est déterminé par une loi fédérale (la même dans les trois régions du pays).
Celle-ci n’est pourtant pas appliquée de la même façon dans tous les CPAS. Loin de là. Comment est-ce possible ?

* Certaines dispositions de la loi sont facultatives. C’est-à-dire que le CPAS peut les appliquer,  mais peut aussi ne pas le faire.
Un exemple fréquent concerne la prise en compte des revenus des parents ou enfants avec lesquels vous cohabitez. Le CPAS peut en tenir compte ; il peut le faire totalement ou partiellement ; il peut ne pas le faire.
Selon ce que fait le CPAS, votre situation peut être totalement différente.
Cas concret : suite à une séparation, vous accueillez votre fille qui a elle-même des enfants. Elle a droit au taux chef de famille. Le CPAS PEUT tenir compte du montant de votre pension ou de votre salaire dans le calcul du montant du RI de votre fille. Celle-ci peut donc se retrouver sans aucun revenu si les vôtres dépassent l’équivalent de deux RI taux cohabitant, et être totalement à votre charge. Si par contre le CPAS ne tient pas compte de vos revenus, votre fille peut percevoir le RI au taux chef de famille complet.

Une différence énorme ! De zéro à 1.295,91 (montant au 1er mars 2020).
Énorme différence en termes financiers, mais aussi en terme d’autonomie et de « dignité ». Avec des conséquences potentiellement importantes en terme de relations familiales.

Un autre exemple : le recours aux débiteurs alimentaires. Le CPAS peut imposer au demandeur de faire valoir ses droits à l’égard des personnes qui sont ses débiteurs alimentaires (conjoint ou ex- conjoint, parents et enfants, adoptant et adopté). Certains CPAS obligent systématiquement leurs  bénéficiaires à le faire, d’autres quasiment jamais. Cela entraîne une différence de traitement énorme : de nombreuses personnes préfèrent renoncer au RI plutôt que d’être forcées à faire intervenir leurs parents ou enfants.

* De nombreuses dispositions de la loi sont interprétables.
Il en va ainsi de la « disposition à travailler », une des six conditions d’octroi du RI. Le bénéficiaire doit être « disposé à travailler » sauf si des raisons de santé ou d’équité l’en empêchent. La manière dont les CPAS examinent si cette condition est remplie… varie très fortement.
Certains CPAS ont des exigences qui dépassent de loin celles du Forem ou d’Actiris ; d’autres ont des exigences beaucoup moins contraignantes.
La loi et l’arrêté royal laissent la place à des interprétations très différentes, voire opposées.
La notion d’ « équité » n’est pas définie.
Les « raisons de santé » sont elles aussi sujettes à interprétation par les CPAS : un « simple » certificat d’incapacité de travail est de plus en plus souvent refusé ; le bénéficiaire est sommé d’« objectiver » son incapacité par des rapports médicaux, ou des certificats d’incapacité établis par des spécialistes.

* De nombreuses dispositions de la loi sont floues.
Elles ne sont parfois pas précisées dans l’arrêté royal.
Elles le sont parfois dans la circulaire générale « DIS ». Mais elles changent au fil des années, et elles constituent une libre interprétation de la loi et de l’arrêté.
La circulaire n’est pas publiée au Moniteur belge et n’a donc, à proprement parler, aucune valeur légale.

* La demande de RI doit faire l’objet d’une enquête sociale.
Un arrêté royal détermine les « conditions minimales de l’enquête ». Mais la façon dont la demande est examinée s’apparente souvent à un véritable parcours du combattant. Et cela entraîne fréquemment la non perception du RI par des personnes qui en remplissent pourtant les conditions d’octroi.

* Enfin, et ce n’est pas le moindre des problèmes, de nombreux CPAS n’appliquent tout simplement pas certaines dispositions de la loi.
C’est fréquemment le cas, par exemple, en cas de récupération d’un indû, d’audition par le conseil (un droit très souvent caché alors que le CPAS a pour mission légale d’informer sur les droits), d’octroi du taux cohabitant à des sans-abris qui ont droit au taux isolé…

Tout cela entraîne qu’il est possible, et fréquent, que vous soyez traités très différemment d’un CPAS à l’autre en dépit du fait que la loi DIS est la même pour tous.

2. L’ASE, l’aide financière équivalente

Il s’agit de l’aide financière accordée aux bénéficiaires qui ne sont pas inscrits au Registre de la population (mais au Registre des étrangers) ou qui ne remplissent pas les conditions d’âge (être majeur ou assimilé) pour avoir droit au RI.
Il existe pour ces personnes une grande insécurité juridique puisque la loi DIS ne leur est pas applicable. Le CPAS peut toutefois (il peut : c’est facultatif) leur imposer certaines des conditions d’octroi du RI, mais il n’est pas obligé – par exemple – de leur accorder les mêmes montants qu’en RI, ni appliquer les exonérations de revenus d’une activité professionnelle.

3. Les aides autres que le RI dont les conditions d’octroi sont définies par des arrêtés royaux

Les conditions d’octroi de certaines de ces aides sont clairement définies (par exemple, l’allocation chauffage). Leur application ne devrait donc poser aucun problème.
S’il est vrai qu’elles sont généralement obtenues plus facilement que le RI, cela n’empêche pas que  certains CPAS mettent des bâtons dans les roues (par exemple en exigeant la fourniture de documents non obligatoires), ou n’informent pas les bénéficiaires de leur existence.

4. Les aides sociales complémentaires.

Elles sont laissées à la totale appréciation du CPAS.  Elles ne sont pas encadrées par des lois ou des arrêtés.
Il est dès lors évident que, pour tout ce qui concerne ces aides, il y a de grandes différences d’un CPAS à l’autre.

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Pour expliquer les grandes différences de traitement d’un CPAS à l’autre, on évoque souvent la relative « richesse » (corrélativement la « pauvreté ») de la commune (et donc de son CPAS) ; la taille de la commune (et donc le nombre de bénéficiaires) ; ou encore l’orientation politique des partis au pouvoir dans la commune (et donc de son CPAS).

Toutefois, nous constatons que des problèmes se posent dans de nombreux CPAS, qu’ils soient petits ou grands, ruraux ou citadins, pauvres ou riches, et quels que soient les partis au pouvoir (le plus souvent en coalition).

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